Le symbole d'un quartier en revitalisation
L’ensemble Freedom occupe une position stratégique au cœur de l’un des principaux points d’entrée de la capitale depuis l’ouest. Portée par l’agence PCA-STREAM, sa restructuration participe ainsi d’enjeux tant parisiens que grand-parisiens. Tout comme le projet d’origine, conçu pour s’intégrer au plan d’aménagement de la Porte Maillot d’après-guerre, sa réinvention doit se faire l’écho des mutations profondes du quartier. La Porte fait notamment l’objet d’un ambitieux projet de requalification visant à transformer le rond-point routier en une place publique. Il prévoit la création d’un terre-plein central, favorisant les mobilités douces, une marchabilité repensée, l’intégration du réseau cyclable RER V, mais également la requalification des jardins attenants à la place pour les relier au Bois de Boulogne, ainsi qu’un renforcement des transports en communs avec l’arrivée du RER E et du tram T3.
Pacifiée et dotée d’un pôle multimodal la transformant en un hub métropolitain, la Porte Maillot offre un nouveau visage, plus vivant et dynamique, qui s’intègre dans la refonte de l’ensemble de l’Axe majeur, entre les Tuileries et La Défense. Ce dernier fait l’objet de plusieurs projets en cours et à venir, qui visent à recoudre ses différents segments et l’adapter de façon durable et désirable aux enjeux du XXIe, dont l’effacement de la dimension d’échangeur routier de la Porte Maillot. La réinvention contemporaine de Freedom fait signal comme l’un des premiers projets achevés du renouveau de la Porte Maillot.
Un patrimoine moderne à réinventer
Un emblème de l'architecture rationaliste
Construit au milieu des années 1960 pour le groupe Kuhlmann, fleuron de la chimie française, l’immeuble Freedom est un bel exemple du modernisme institutionnel né après-guerre. Exceptionnel par sa longueur linéaire, le bâtiment développe une trame géométrique rigoureuse, sobre mais monumentale, typique des immeubles de bureaux de prestige des Trente Glorieuses. Dessiné par l’architecte René-André Coulon, ancien collaborateur de Robert Mallet-Stevens, et auteur de nombreux grands programmes publics, ainsi que de l’hôtel Méridien Étoile à proximité immédiate, le bâtiment a largement été publié dans la presse architecturale des années 1960, et reste aujourd’hui cité parmi les immeubles remarquables du XXe siècle dans le Guide d’architecture Paris d’Éric Lapierre, ouvrage de référence édité par le Pavillon de l’Arsenal. Doté d’éléments assez techniques pour l’époque, notamment les huisseries et la façade en mur-rideau métallique, il incarnait une certaine idée de la modernité et du luxe, avec son hall en marbre doté de faux plafonds lumineux et d’un habillage bois élégant, répondant au contexte prestigieux de cette pointe cossue du Quartier Central des Affaires.
Un ensemble hors d'usage
Près d’un demi-siècle plus tard, Freedom offrait néanmoins un visage terni. L’immeuble était peu visible malgré l’importance de son linéaire, présentant une disproportion d’image entre son niveau de standing perdu et celui du quartier. D’une organisation fonctionnelle mais sans qualité particulière, il a souffert de campagnes d’aménagement successives peu inspirées, qui n’ont pu résoudre les problématiques liées à la faible hauteur sous plafond et la relative étroitesse des plateaux, notamment au regard des standards tertiaires contemporains. À l’extérieur, il présentait un habillage globalement dégradé, avec des manques dans les parements de marbre et des huisseries obsolètes, non fonctionnelles et peu performantes énergétiquement, notamment sur la façade sud. Plusieurs fois remaniée au fil du temps, la décoration intérieure avait perdu son intégrité originelle, affectant notamment un rez-de-chaussée inanimé, ayant perdu ses transparences de vue en direction du jardin, lui-même totalement encombré d’aires de livraison, de locaux ou édicules techniques, le privant de toute qualité visuelle ou d’usage. D’un point de vue technique et réglementaire, l’ensemble était par ailleurs devenu totalement hors norme, tant au niveau de la sécurité que de l’accessibilité.
Stratégie architecturale
PCA-STREAM a élaboré une stratégie architecturale permettant d’équilibrer financièrement une restructuration nécessairement lourde, en créant des surfaces supplémentaires en superstructure et au moyen d’un épaississement côté sud, tout en répondant aux quatre grands principes pour les espaces tertiaires de demain, identifiés par l’agence au fil de plus de quinze ans d’études de son équipe de recherche appliquée.
Faire signal en combinant héritage et modernité côté boulevard
Plus que jamais, la fonction d’un siège social est d’incarner l’identité et les valeurs distinctives de l’entreprise pour les clients comme pour les collaborateurs. PCA-STREAM a pour cela pris le parti d’une réinterprétation modernisée des façades, en accentuant le principe originel d’un bâtiment Janus avec deux faces de nature différente.
Au nord, côté Porte Maillot, la rigueur de l’écriture originelle du bâtiment est préservée, tout en étant mise à jour techniquement et stylistiquement. L’isolation par l’extérieur optimise les performances énergétiques du bâtiment, tandis que la dépose des allèges permet des vitrages toute hauteur qui apportent de la luminosité, compensent la faible hauteur sous plafond, et épurent encore la géométrie de la trame. L’emploi du marbre permet un rappel patrimonial à la monumentalité d’origine du bâtiment, soulignée par une entrée remarquable en double-hauteur.
Pour faire signal depuis l’entrée ouest de la ville, l’immeuble est couronné en attique d’une galerie monumentale en double hauteur sur toute la longueur de l’avenue de l’Amiral-Bruix. Composée de vantelles de verre photovoltaïque, elle s’éclaire la nuit comme un phare urbain, ses leds développant un subtil gradient de couleur selon un programme d’animation lumineuse s’inspirant du cycle des saisons.
Une façade-paysage pour habiter le côté jardin
À l’inverse, coté sud, l’agence crée une façade vivante totalement neuve agrémentée d’espaces extérieurs de terrasses et balcons. Dotée de formes ondulantes plus organiques, habillées d’une végétation grimpante sur toute sa hauteur qui limite la masse perçue, cette façade est davantage en rapport avec la domesticité de ce côté-ci du quartier, donnant sur les jardins d’hôtels particuliers.
Créer des espaces communs généreux et faire vivre les circulations
Le bureau est un véritable outil managérial. L’architecture doit y spatialiser l’expérience collective, qui conditionne l’innovation, l’efficacité et la sérendipité pour les entreprises de pointe. Comme au début de l’après pandémie l’a remis en avant, il est crucial de pouvoir attirer et retenir les meilleurs talents au sein de bureaux favorisant le bien-être au travail.
Pour Freedom, il s’agissait de rationaliser les espaces et de leur redonner de la lisibilité, notamment en travaillant les circulations. Une nouvelle desserte verticale est ainsi assurée par un noyau de circulation regroupant les ascenseurs et des escaliers Chambord en premier jour, où chacun aura plaisir à se croiser. Une proportion élevée d’espaces communs et informels favorise la convivialité et la sérendipité entre collaborateurs, tandis que de nombreuses salles de réunion stratégiquement situées au bout des escaliers invitent au travail collectif. Dans les étages, de grands plateaux ouverts et modulables en premier jour offrent des conditions de travail agréables et flexibles, ainsi que l’accès pour tous à de larges coursives et terrasses plantées.
Freedom a ainsi été adopté par Murex, entreprise leader du secteur des technologies financières, dont le modèle est basé sur l’innovation et le travail collectif en mode projets.
Offrir une grande variété de services
Le bureau doit aujourd’hui pouvoir accueillir une large variété de services, notamment en réactivant ici le socle de Freedom, qui retrouve toute sa transparence.
Libéré des fonctions de desserte des véhicules, le rez-de-chaussée devient un espace de détente et de loisir ouvert sur la ville et sur le jardin privé exposé plein sud. Il invite au travail informel et à la rencontre dans son lounge, et dispose d’une offre de services et restauration, avec un espace click and collect pour les collaborateurs de Murex.
Le rez-de-chaussée bas dispose quant à lui d’un business center, avec salles de réunion, foyer, vestiaire, tisanerie, ainsi qu’un auditorium de cent-cinquante places et un restaurant d’entreprise, qui peuvent notamment être utilisés pour des trains et des scrums. Dans les plateaux, plusieurs espaces tisanerie sont stratégiquement disposés à chaque étage.
Offrir des espaces extérieurs reconnectant à la nature
Dépassant l’image traditionnelle du cube hermétique, le bureau doit s’ouvrir vers l’extérieur et travaille ses porosités avec la ville et la nature environnante. Comme cela est aujourd’hui scientifiquement prouvé, l’accès à des extérieurs végétalisés est un facteur déterminant de bien-être et répond aux aspirations à la biophilie de plus en plus prégnantes chez les jeunes générations de collaborateurs.
Pour Freedom, PCA-STREAM a développé un riche dialogue entre intérieur et extérieur qui offre un nouveau rapport au paysage. À chaque étage, les traversées visuelles sont privilégiées, avec notamment d’impressionnantes surfaces vitrées sur jardin, et des terrasses et coursives largement végétalisées, pour un moment de pause ou un coup de fil en plein air. Le jardin privé, idéalement exposé au sud, est lui totalement libéré de tout élément technique ou aire de livraison, de façon à développer un riche projet paysager sur plusieurs strates, accueillant des espaces de détente ou de déjeuner en lien avec le socle.
Freedom devient ainsi une nouvelle pièce des efforts urbanistiques pour retrouver les liaisons entre Paris et le Bois de Boulogne, sur lequel la galerie en attique, entre intérieur et extérieur, offre des vues exceptionnelles.
Un ouvrage vertueux
L’heure n’est plus aux grands gestes stylistiques gratuits, une architecture véritablement contemporaine doit viser la durabilité, mise au cœur du projet Freedom, et ceci dès le choix initial d’une restructuration par rapport à une démolition/reconstruction.
Optimiser les économies d'énergie
Le travail sur l’optimisation énergétique du bâtiment a renforcé le choix architectural d’un traitement en deux faces distinctes de son enveloppe. Il s’agissait au nord de renforcer l’isolation, par l’extérieur, tout en améliorant l’apport de lumière en rez-de-chaussée et dans les plateaux par une augmentation significative du clair de vitrage. Au sud, plus exposé, les coursives horizontales sont conçues pour former des brise-soleil fixes, tandis que la végétation grimpante offre un écran de fraicheur en été qui disparait en hiver, optimisant ainsi la protection solaire selon les saisons et permettant des économies d’énergie en climatisation l’été et en chauffage l’hiver. Le choix d’un nouvel escalier Chambord en façade, lumineux et agréable, permet d’inciter à privilégier la marche sur les ascenseurs. Les vantelles en verre photovoltaïque de la galerie en attique permettent enfin une production électrique réinvestie dans le programme d’éclairage du bâtiment.
Renforcer la biodiversité
Avec l’idée de profiter de la restructuration de Freedom pour le transformer en un véritable bâtiment-paysage, un accent tout particulier a été mis sur le renforcement de la biodiversité sur le projet. Le réaménagement paysager du jardin a notamment permis une nette augmentation de la plein terre et des surfaces plantées, qui accueillent de nouveaux sujets d’ampleur mais également des prairies de graminées fleuries dont le rôle écosystémique est déterminant. Au sein du jardin comme de l’espace végétalisé côté Porte Maillot, des dispositifs de noues permettent une bonne gestion hydrique. Au sud, la remarquable façade vivante permet un continuum végétal depuis les prairies de graminées, en passant par les bacs des terrasses, liés par les plantes grimpantes, et jusqu’au toitures inaccessibles, totalement végétalisées. Freedom s’inscrit ainsi résolument dans le projet de rétablissement de corridors écologiques sur l’ensemble de l’axe majeur et en connexion intime avec le Bois de Boulogne tout proche.
Suivi de chantier
Photographies par Jean-Philippe Mesguen.








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Informations
Client | AXA Real Estate |
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Programme | Restructuration d’un programme de bureaux |
Localisation | 15-25 boulevard de l'Amiral Bruix, 75016 Paris |
Mission | Complète |
Surface | 17 500 m² |
Statut | Livré |
Certifications | HQE Rénovation Excellent ; BREEAM Refurbishment Very Good ; Label Effinergie Rénovation ; WELL niveau Silver ; BIODIVERCITY niveau Performant |
Équipe | — Maîtrise d'ouvrage : AXA — Maîtrise d'ouvrage déléguée : Vinci Immobilier — BET généraliste : Egis — BET Façade : Elioth — Accoustique : Acoustb — Économiste : EGIS — BET Environnement : Green Affair — Conseil Sécurité Incendie : CSD Faces — Contrôle Technique : BTP Consultant — CSPS : LM3C — Paysagiste : A&SE — Éclairage extérieur : 8'18'' — Programmation cuisine : Ceres — Conseiller patrimonial : Grahal |