La création de pôles pour l’économie du savoir

  • Publié le 28 décembre 2016
  • Marty Van de Klundert

Le rôle croissant de la connaissance dans l’économie modifie en profondeur les attentes relatives aux environnements contemporains du travail. Partout, avec des réussites variables, se multiplient « Campus et Parcs de l’Innovation ». Marty Van de Klundert et Willem Van Winden identifient quatre critères stratégiques de succès : optimiser la réunion de connaissances par une sélection ciblée des colocataires ; gérer le passage de la collaboration des entreprises en phase d’exploration à la compétition en phase d’exploitation ; faciliter l’émergence sur site de filiales et de start-ups ; promouvoir une diffusion de la connaissance à la fois active (événements, conférences) et passive (organisation physique du campus). Si l’efficacité de ces parcs de l’innovation reste incertaine, il n’en demeure pas moins que les qualités immatérielles d’un environnement de travail – image, design, voisinage – apparaissent stratégiques dans l’économie du savoir.

Ce texte a été publié en 2008 dans le cadre du colloque « Corporations and Cities » initié par l’Université de Deflt et le Berlage Institute. Il est reproduit ici dans une version enrichie et révisée.

Introduction

L’intensité croissante de l’économie du savoir transforme les demandes concernant les milieux de travail contemporains. Partout en Europe, on peut observer toutes sortes d’initiatives de (re-)développement des centres d’affaires et des parcs scientifiques, des campus technologiques et des paysages de travail. Ces projets se distinguent par leurs objectifs, leur diversité ou leur marque, mais ils ont, pour la plupart, au moins une chose en commun : ils supposent une valeur ajoutée car ils sont spécifiquement conçus dans le cadre de la colocation. De tels pôles, véritables perles rares de l’aménagement urbain, sont censés stimuler l’innovation. Néanmoins – malgré de fortes convictions – par différentes données empiriques, leur succès s’est révélé illusoire.

En prenant tout cela en compte, nous souhaitons traiter ici de la conception architecturale et de l’organisation d’espaces du savoir réussis, et de ce qui devrait être envisagé afin d’optimiser l’innovation. À partir de recherches et de missions de terrain menées dans plusieurs villes, nous proposons des modèles ou stratégies de « gestion du savoir » dans des lieux dédiés. Les exemples qui illustrent ces stratégies reposent sur des observations pratiques et des entretiens avec des experts dans de nombreux pôles du savoir en Europe. Nous porterons une attention particulière à Arabianranta à Helsinki en Finlande et au Campus High Tech à Eindhoven, deux cas paradigmatiques de gestion du savoir réussie.

L’objectif de l’aménagement urbain

Avant d’aborder des questions stratégiques précises, il est important de noter le fait que les pôles du savoir ne sont pas tous créés pour les mêmes raisons et selon un même but. Quelle est l’idée principale ou l’objectif premier du concept ? Qui en prend l’initiative ? Qui dirige ? De quelle manière le projet initial est-il mené ? Ce sont, généralement, les organismes du secteur public qui pilotent les pôles du savoir. Certains de ces lieux sont le fruit de volontés politiques, comme la valorisation de l’économie du savoir, d’autres ont des ambitions plus précises : les pôles affiliés aux universités cherchant à développer le savoir universitaire en biens commercialisables en sont un exemple. Certains sont plus axés vers le monde des affaires et leur finalité est de développer l’innovation et la rentabilité d’une entreprise. Tandis qu’un pôle du domaine public ou d’une université peine éventuellement à se concentrer sur une vision définie, un projet d’entreprise évite de tels risques. Le nombre d’intervenants est réduit, la prise de décision est claire et les stratégies politiques sont simplifiées, plus encore lorsqu’un acteur privé, éminent, ayant des relations aux niveaux local et politique prend les devants.

Stratégies de gestion du savoir

La valeur ajoutée d’un pôle du savoir réside dans les effets positifs de la colocation d’entreprises et de centres de recherche. Mais, pour bénéficier de ces avantages, la gestion du savoir est indispensable. Voici cinq stratégies issues de programmes de gestion du savoir réussis : optimiser la distance cognitive, gérer la « co-opétition », faciliter les retombées économiques, et promouvoir la diffusion tant active que passive du savoir.

Optimiser la distance cognitive

Une première stratégie consiste à garantir une « distance cognitive » optimale entre les locataires de pôle. Une distance cognitive optimale signifie que « l’écart » cognitif entre les personnes et les entreprises du pôle est assez important pour créer de nouvelles idées, mais aussi suffisamment restreint pour alimenter la collaboration. Plusieurs études montrent qu’une distance cognitive optimale entre partenaires augmente les chances d’une coopération fructueuse, qui aboutit finalement à l’innovation. Supposons qu’une distance cognitive optimale entre les locataires des parcs soit propice à un échange de connaissances efficace et fécond, une autre question se pose : comment gérer ce facteur ?

Une possibilité est d’appliquer une politique d’admission reposant sur un concept soigneusement détaillé propre au pôle. Au lieu de viser un groupe élargi et diffus (« les entreprises de haute technologie »), la gestion peut se concentrer sur un secteur précis ou une « communauté de pratiques ». Afin de générer une masse critique, la création d’une image de marque peut éventuellement aider à identifier et cibler des groupes spécifiques. Cette image peut être transposée en critères d’admission de locataires afin de maintenir l’objectif et éviter la fragmentation.

Arabianranta, Helsinki

Arabianranta est une zone industrielle réaménagée du nord-ouest de Helsinki. Au milieu des années 1990, elle a été reconfigurée en un quartier à fonctions multiples : logements, loisirs, établissements éducatifs et bureaux, le tout régi par un thème « art & design » à l’origine des louanges internationales et du succès commercial de ce projet. Historiquement, Arabianranta est le berceau d’une des plus grosses industries de porcelaine en Europe, appelée Arabia. La marque Arabia était reconnue pour sa qualité et le design de ses produits, mais sa faillite au cours de la seconde moitié du xxe siècle entraîna la fermeture des usines et laissa le quartier dans un état de décharge polluée. Au début des années 1990, le gouvernement s’est mis à la recherche d’une stratégie de renouvellement et s’est arrêté sur un objectif de revitalisation de son patrimoine de design de qualité. En outre, l’école d’art et de design de Helsinki, de classe internationale, y avait monté une annexe temporaire dans un immeuble désaffecté, et un petit nombre d’agences de design commençaient à s’y installer.

Depuis 1995, le réaménagement et la gestion ont été repris par une entreprise spécialisée appelée ADC – Art and Design City, Helsinki – composée de la Ville de Helsinki, de l’école d’art et de design, ainsi que d’importantes agences de design et d’établissements d’enseignement supérieur des environs. Ces acteurs agissent ensemble pour développer et mettre en œuvre les stratégies de gestion et d’aménagement du quartier. Avec le temps, l’art dans les lieux publics a fait l’objet d’importants investissements et la qualité de conception des bâtiments a été incroyablement élevée. Chaque immeuble est doté d’infrastructures haut débit de pointe, transformant le quartier en un « terrain de jeux » particulièrement intéressant pour des entreprises innovantes, notamment pour le développement et les tests de leurs nouveaux produits et services. Arabianranta est ainsi devenu le quartier de prédilection en termes d’innovation « par l’utilisateur », un processus dans lequel les communautés résidentes participent à l’élan d’innovation. ADC se fait instigateur et gestionnaire des réseaux pour les nouveaux projets. Arabianranta aspire à devenir l’un des centres-phares de l’art et du design de la région baltique grâce à la méthode « Quadruple Helix » : des partenariats stratégiques entre des entreprises, organismes publics, établissements de recherche et citoyens. Le quartier compte aujourd’hui cinq établissements d’études supérieures, un grand nombre d’agences de design renommées – dont la plupart sont étrangères –, un mélange de quartiers résidentiels haut de gamme et de logements sociaux, et des infrastructures de grande qualité. Il a attiré quelques 10 000 habitants, dont 5000 étudiants et 300 entreprises du milieu créatif qui emploient 4000 personnes.

Arabianranta, Helsinki  © Spacevalue

Les entreprises expliquent qu’elles apprécient l’ambiance créative du lieu et, en outre, attachent une grande importance à la présence de l’école d’art et de design. Arabianranta s’est constituée une réputation solide, c’est « the place to be » pour les agences de design. Selon certains entrepreneurs, être basé à Arabianranta contribue au commerce et facilite le recrutement d’employés compétents. De nombreuses agences s’y installent pour rester au courant des dernières tendances. Le buzz est encore plus important pour d’autres avantages, comme la facilité d’un réseau accessible et la coopération commerciale. Il est moins aisé de mettre en pratique des conditions d’admission dans le cadre de pôles établis depuis longtemps ou bien très étendus. Afin de reproduire cette démarche auprès de pôles du savoir plus importants, le rassemblement d’entreprises du même type dans des zones ou clusters pourrait créer des mini-climats promoteurs d’une meilleure identité culturelle locale.

Gérer la « co-pétition »

Une autre stratégie de gestion du savoir est un programme de « co-opétition » clair et défini. La « co-opétition » désigne la coopération des entreprises et l’union de leurs forces pendant les premières phases de recherche et développement (phase d’exploration) puis leur évolution vers la concurrence au cours des phases plus tardives de commercialisation et d’inauguration (phase d’exploitation). La transition de la première à la deuxième phase peut être délicate et crée parfois même des problèmes si des mesures précises ne sont pas prises au préalable. La gestion active du pôle peut aider dans le cadre de ce risque relationnel ; l’administration peut par exemple protéger la propriété intellectuelle en proposant un brevet pro-actif. Une autre tactique consiste à éviter d’associer en un même pôle des activités pré-compétitives et post-compétitives, ce qui empêche complètement ce type de problèmes. La gestion du pôle peut aussi, par exemple, se concentrer sur la phase d’exploration en investissant davantage dans la recherche et (un peu) dans le développement d’activité. Un cas typique est le Campus High Tech de Eindhoven, un parc scientifique privé au bord de la ville. Le locataire principal et acteur décisif, le département de recherche de Royal Philips Electronics, gère le parc via des entreprises et des organismes dont le centre d’intérêt principal est la recherche fondamentale. Seule l’affiliée Philips Applied Technologies est active dans les phases d’« exploitation » ou de production, transformant des idées en biens.

Faciliter les extraprenariats (spin-offs) et les filiales

Une troisième stratégie d’amélioration de l’innovation est de faciliter la création de spin-offs et de filiales d’une société-mère ou d’une université du pôle. Tout porte à croire que si « la mère et l’enfant » se situent au même endroit, des synergies de connaissances ont de grandes chances de s’établir. Dans le cas de pôles de recherche ou de développement, comme dans celui des parcs scientifiques, il est de plus en plus courant de trouver des incubateurs où peuvent croître des filiales. Dans le cadre de pôles de recherche supérieurs, les conditions des spin-offs sont optimisées au-delà du simple support d’activités, à savoir un loyer bon marché et des équipements de base. De tels pôles comportent des subventions internes, des financements et des capitaux-risques, ainsi qu’un accès à un réseau d’expertise logistique dans les domaines du marketing, de la logistique et de la gestion, dont manquent souvent les start-ups universitaires. Néanmoins, la gestion des entreprises filiales nécessite des stratégies différentes de celles des spin-offs universitaires. Elles sont fortement liées au développement d’une chaîne de valeurs existantes. Elles peuvent émerger pour différentes raisons : l’entreprise mère peut cesser un type d’activité qui s’est accru et la reporter sur une entité à part entière ; des chercheurs d’une société-mère peuvent découvrir de nouveaux produits ou développer des idées qui ne correspondent pas au profil/portfolio de la société mais qui ont pourtant un potentiel commercial, une nouvelle entreprise est donc créée ; ou encore, des employés individuels peuvent se réunir pour créer une nouvelle société. Il est alors possible que des problèmes de concurrence avec la société-mère émergent (mais pas nécessairement). Dans ce cas de figure, les spin-offs universitaires sont moins problématiques.

Au Campus High Tech de Eindhoven, les membres de l’organisation assistent les filiales et les start-ups extérieures de différentes manières, dont le maintien d’un fonds Technostar dédié aux nouveaux entrepreneurs technologiques. Technostar apporte non seulement un soutien financier mais aussi une assistance en termes de développement d’entreprise, de réseau et d’encadrement. D’un point de vue matériel, les start-ups sont logées grâce à un « accélérateur technologique et commercial », une pépinière d’entreprises aux loyers réduits et aux espaces dédiés.

Organiser la diffusion de la connaissance

Une quatrième stratégie d’innovation d’un pôle est la promotion active de la diffusion du savoir in situ. Pour cela, il existe divers moyens : organiser des événements ou des séminaires conjoints favorisant le développement du réseau et les rencontres ; créer une bonne ambiance de rencontres informelles et détendues ; gérer le réseau pour promouvoir ces rencontres par l’organisation de réunions d’affaires, de conférences et de colloques. Les gestionnaires de réseau peuvent, par exemple, rassembler des partenaires autour d’un sujet donné.

Au campus de Eindhoven, il existe un procédé pertinent et rapide de validation des connaissances. Le « Technology Liaison Office » [Bureau des liaisons technologiques] entretient un contact étroit avec les locataires et crée des liens potentiellement précieux entre eux. Le bureau fonctionne comme un intermédiaire dans l’échange de technologies et la gestion des retombées entre locataires. Il organise des ateliers, des réunions d’affaires et des événements favorisant le réseau afin d’améliorer la diffusion du savoir. Il a également créé le « Campus Technology Liaison Club » [Club des liaisons technologiques du campus], un réseau de décisionnaires et de personnalités du campus. La mission principale du bureau est de construire et maintenir une communauté de pratiques. En fin de compte, le but de la communauté est d’avoir le sentiment de travailler sur un campus et non au sein d’une entreprise individuelle. Afin d’encourager le sentiment de sécurité, le « Intellectual Property and Standards Office » [Bureau de la propriété intellectuelle], dédié à l’attribution de brevets pour des innovations réalisées sur le campus, a été instauré.

Promouvoir des échanges de connaissances imprévus

Un outil complémentaire est la promotion passive de la diffusion du savoir. L’échange de connaissances peut être promu par l’aménagement urbain d’un quartier et le positionnement intelligent de certaines fonctions en son sein. Par exemple, fournir des équipements collectifs (comme des salles blanches ou des appareils coûteux) augmente les rencontres entre les personnes et les entreprises, et favorise la coopération et l’échange. La disposition d’équipements collectifs et d’un espace ouvert sur le campus forme une « scène » pour la diffusion du savoir et pour l’interaction entre les habitants et les organismes.

Le Campus High Tech de Eindhoven fait preuve d’un aménagement spécifique, et des règles bien précises encouragent l’interaction et la diffusion du savoir. Les architectes ont choisi de centraliser les équipements publics et de répartir les différentes zones fonctionnelles autour d’eux de manière concentrique. Au cœur du campus se trouvent les espaces à usage collectif (les restaurants, magasins et salles de réunion) regroupés en un immeuble appelé « The Strip » [la bande], à côté duquel sont situés des équipements communs comme « MiPlaza », « The Holst Centre » et le « Centre pour la médecine moléculaire » ; ces bâtiments comprennent des salles blanches, des laboratoires, et d’autres espaces spécialisés. Plus excentrés, on trouve des parkings à silos parsemés entre des immeubles à usages mixtes. Enfin, les équipements sportifs et l’école maternelle sont situés en périphérie. La distance maximale entre les installations centrales et les autres équipements sur le campus est d’environ huit minutes à pied.

Les stratégies d’aménagement ont été renforcées par une réglementation stricte et propre au campus. La zone intérieure est inaccessible aux voitures et les grands espaces verts paysagés sont de grande qualité. Les employés et visiteurs sont ainsi incités à se rendre à pied à leur destination au sein du campus, exhortant une fois de plus les rencontres dans un milieu accueillant. Les salles de réunion des immeubles privés ne peuvent accueillir plus de huit personnes, au profit de salles plus larges situées dans « The Strip ». Les immeubles privés ne peuvent pas non plus comporter de cantines ni de cafés, car eux aussi sont proposés dans les espaces communs. Même les équipements sportifs, également à usage collectif, privilégient surtout les sports d’équipe aux dépens des entraînements individuels.

Conclusions, recommandations et quelques précautions

Les promoteurs de pôles du savoir et les gouvernements locaux ont généralement des attentes très précises quant au potentiel d’innovation des nouveaux quartiers. Néanmoins, la plupart des entreprises ont des rapports privilégiés avec des partenaires extérieurs plutôt qu’avec leurs voisins de pôle. Peu d’études aux résultats concluants ont su dire si le succès des entreprises situées sur des pôles était dû à une corrélation de facteurs déjà présents dans le quartier, ou s’il venait de la colocation. Ainsi, rien ne mène à croire que les pôles du savoir puissent être stimulés par l’interaction locale seule. De plus, fort souvent, les interactions qui se font dans de tels lieux peuvent ne pas être directement liées au savoir et à l’innovation, mais elles peuvent néanmoins être fructueuses pour les entreprises en leur donnant accès à des informations commerciales par exemple (comme les tendances des marchés) et à des conseils stratégiques (comment obtenir des financements).

Un autre point important est de réaliser que les travaux d’innovation se font très différemment selon les domaines. Les métiers créatifs dépendent énormément d’un réseau efficace de « bonnes personnes » et de relations clients fondées sur l’innovation ainsi que d’ambiances stimulant la créativité. Le travail freelance et le turnover très élevé y sont très fréquents et la réputation est un atout essentiel. En revanche, dans les domaines scientifiques (comme la biotechnologie), les procédés d’innovation sont très systématisés et s’appuient sur des connaissances formelles et des méthodes scientifiques. Le « savoir-quoi » et le « savoir-comment » sont plus pertinents et poussent les entreprises à se montrer très sélectives dans le choix de leurs partenaires. La coopération technique se fait souvent à travers des partenariats internationaux. Et même au sein de domaines spécifiques, les modes d’innovation peuvent différer – le design industriel est très différent d’un tournage de film et la découverte d’une nouvelle molécule implique d’autres procédés et « proximités » que le développement de tissus humains.

Enfin, ne vous attendez pas à ce qu’un simple bar cherche à se faire promoteur d’innovation. Comme le montre Hubert, dans le cas d’employés des NTIC [Nouvelles technologies de l’information et de la communication] de Cambridge, « dans les bars, les gens sont souvent trop ivres pour dire quoi que ce soit de techniquement cohérent. »

Au vu des restrictions listées ci-dessus, quels outils sont disponibles pour les promoteurs et concepteurs des pôles du savoir ?

  • Sélectionner les locataires. Assurez-vous que les locataires du pôle soient plus ou moins complémentaires. La « distance cognitive » entre les locataires ne doit pas être trop grande (c’est-à-dire qu’ils appartiennent à des domaines complètement différents) ni trop faible (s’ils sont trop semblables, ils ne verront pas l’intérêt de collaborer). La sélection des locataires peut se faire par l’établissement de critères d’admission pour les nouveaux arrivants.
  • Offrir des installations professionnelles collectives (des salles blanches, des laboratoires, des services de prototypage, des organismes de financement, des services de soutien aux entreprises, etc.). Ces mesures offrent aux locataires des installations haut de gamme et leur permettent ainsi de se concentrer sur leur activité principale : l’innovation. De nombreux établissements du savoir sont très satisfaits des solutions « clé en main » et des prix tout-en-un comprenant l’accès à tant d’excellents équipements et infrastructures, d’autant plus qu’ils peuvent mener à des rencontres imprévues entre sociétés locataires.
  • Assurer un programme d’activités pertinent. L’organisation de discours-programmes avec de grandes figures du monde industriel, des démonstrations de nouvelles technologies, etc. peut provoquer un élan fédérateur et rassembler des personnes différentes autour d’un intérêt commun. De la même façon, l’organisation d’événements, comme des tournois sportifs ou des manifestations culturelles, participe à la création de liens sociaux et, potentiellement, à des coopérations professionnelles.
  • Promouvoir l’interaction par l’aménagement de la ville et du paysage. Le pôle peut être aménagé de façon à favoriser les rencontres fortuites au sein des espaces publics. Des aménagements comme des parcs mais aussi une faible circulation, des promenades piétonnes et/ou des pistes cyclables sont autant d’éléments favorables.
  • Créer des équipements et commodités centralisés. La centralisation des bars, restaurants et salles de réunions augmente les chances de rencontres et permet aussi de donner au lieu un centre et une identité. Dans un pôle très réglementé, les locataires n’ont parfois même pas le droit d’avoir leurs propres équipements et commodités, comme sur le campus d’Eindhoven.
  • Offrir des services spécialisés pour les start-ups. Les jeunes entreprises sont fortement pourvues d’idées et de forces novatrices, il faut donc s’assurer qu’elles se sentent à l’aise au sein du pôle en leur offrant, notamment, des loyers plus attractifs et des services de soutien. Vous pouvez également les mettre en contact avec des entreprises plus importantes sur le site, de nouveaux clients potentiels, ou les aider à élargir leur réseau.

Traduit de l’anglais par Colette Taylor-Jones

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