Construire en hauteur : les vernaculaires du capitalisme

  • Publié le 21 janvier 2017
  • Carol Willis
  • 8 minutes

Le développement d’une ville est influencé par de nombreuses règles économiques, politiques et technologiques. La place qui y est réservée au travail façonne son image. L’étude comparée du développement de Chicago et de New York des années 1890 aux années 1940 par Carol Willis permet d’exposer la théorie des « vernaculaires du capitalisme », soit la manière dont règles urbaines et facteurs économiques produisent des expressions tridimensionnelles diverses.

Carol Willis est historienne de l’urbanisme et de l’architecture, spécialisée dans l’histoire de la construction de villes américaines.

Jesse Seegers est architecte, journaliste, critique d’architecture et graphiste.

(Entretien par Jesse Seegers)

Jesse Seegers : Commençons par parler du thème de Form Follows Finance. L’ouvrage traite de l’invention et du développement des gratte-ciel à Chicago et New York, des années 1890 jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Vous soutenez que la force motrice des gratte-ciel est leur potentiel de rentabilité, avant d’examiner en détail les évolutions de New York et de Chicago et les raisons de leurs différences. Selon vous, les qualités uniques qui caractérisent chaque ville ont eu un effet plus important sur la morphologie et le développement des gratte-ciel que tout geste volontaire d’un architecte.

Form follows profitability, and light

Carol Willis : En élaborant le livre, j’ai analysé l’histoire du gratte-ciel et j’ai trouvé qu’il y avait eu une interruption naturelle autour de l’après-guerre. Il y a clairement une différence entre la période d’avant-guerre et le revival des gratte-ciel de l’après-guerre des années 1950. Souvent expliquée comme une simple évolution stylistique, cette distinction visuelle tient à d’autres raisons très importantes. Si l’on définit le développement des gratte-ciel comme l’expression de forces économiques, culturelles et stylistiques, alors chacune des deux époques que je présente montre une approche radicalement différente de la typologie du gratte-ciel. Je fais débuter mon propos à l’émergence du gratte-ciel dans les années 1890 – même si certains remontent aux années 1870 – quand les immeubles commencent vraiment à prendre de la hauteur. À New York, ils atteignent les vingt étages, dépassant les hauteurs pré-1880 de 9 à 14 étages. Au cours des années 1900-1920, les constructions élevées sont très convoitées et nombreux sont ceux qui cherchent à construire l’immeuble le plus haut du monde. On observe alors l’expression de l’élan commercial et capitaliste se dressant sur l’horizon urbain. Mais ces immeubles sont modelés, contraints même, par des forces tout autres que celles d’après la Seconde Guerre mondiale.

La plupart des historiens de l’architecture ont tendance à y voir l’essor du Style international et l’émergence de matériaux modernes, comme l’acier et le verre, et de technologies modernes, tels que les murs-rideaux et la climatisation. Ces derniers sont certes très importants après-guerre, mais le mot-clé est ici « style ». Le changement spectaculaire d’après-guerre m’apparaît comme un développement discret qui doit être décrit selon ses propres termes. En prenant cette période d’une cinquantaine d’années, de 1890 à 1940 environ, je montre en quoi ces bâtiments sont essentiellement les mêmes.

Form Follows Finance, 1995 © Carol Willis Archives - The Skyscraper Museum, New-York

Je pose la question suivante : si le bureau génère le plan de construction, pour reprendre l’expression de Le Corbusier « le plan est le générateur », alors pourquoi la manifestation tridimensionnelle du bureau est-elle si différente à New York et à Chicago, alors qu’ils utilisent le même plan type ? Je constate qu’il existe deux typologies très distinctes, l’une à Chicago, l’autre à New York, ce que l’on peut observer jusqu’aux années 1910. Puis, dans les années 1920, certains affirment que les deux villes tendent à se ressembler, mais si l’on rentre vraiment dans le New York versus Chicago des années 1920, comme je le fais dans l’ouvrage, les deux villes s’avèrent très différentes. Il me semble que d’autres spécialistes ont mal interprété leurs immeubles, et je désire montrer comment et pourquoi les immeubles de Chicago ressemblent à des immeubles de Chicago, et ceux de New York ressemblent à des immeubles new-yorkais.  J’identifie donc des caractéristiques et contraintes génératrices importantes.

Pour les deux villes, l’économie semble être le facteur générateur clé et l’éclairage naturel, la contrainte principale. Les immeubles nécessitent de grandes fenêtres et une distance traversante plutôt faible qui imposent la forme du bâtiment : des puits de lumière doivent être aménagés, souvent au centre ou par une cour en U. Le zonage et les règles municipales de construction sont deux facteurs divergents entre New York et Chicago. Alors que Chicago a fixé une hauteur maximale de construction dès 1893, il faut attendre 1916 pour toute limitation de forme ou de taille à New York. À Chicago, l’aménagement favorise un plan urbain en îlots carrés, ce qui permet d’occuper une parcelle ou un quart de pâté de maison, tout en étant coupé par une ruelle ou un passage de service. Avec un demi pâté de maison, l’on peut avoir une empreinte de construction normale. Inversement, à New York, les immeubles peuvent être plus élevés en se limitant à des plans plus petits, contraints par des parcelles plus restreintes. Dans ce contexte, il semble logique de privilégier une tour et des bureaux plus étroits sur un plan de circulation plus solide et plus sombre. Les contraintes de la lumière du jour, des tailles de parcelles et des exigences municipales créent une recette pour la meilleure expression économique du développement. Voilà comment, à l’époque, tous les immeubles à Chicago se ressemblent et tous ceux à New York se ressemblent également ; pas tous, bien entendu, mais la tour devient une typologie.

Form Follows Finance, 1995 © Carol Willis Archives - The Skyscraper Museum, New-York

Jesse Seegers : Et, après 1916 à New York, seuls quelques immeubles – comme ceux de Raymond Hood – étaient des tours.

Carol Willis : Oui, Hood a maintenu sa prédilection pour la tour et savait comment amener, par la ruse, les promoteurs immobiliers à construire selon ses désirs plutôt que ce qui était dicté par les lois d’aménagement.

Jesse Seegers : Parlons du concept de la grille : si l’on remonte à Hippodamos de Milet, la grille est le paradigme de la spéculation urbaine. Être en mesure de quantifier un terrain et de spéculer dessus, souvent en rapport avec les terrains environnants, est emblématique – l’on pourrait même appeler cela le vernaculaire urbain du capitalisme. Si l’on tente d’imaginer la transformation de la grille new-yorkaise par son élévation en trois dimensions (dont le dessin de J.L. Kingston en 1929 est un très bel essai), le meilleur exemple de réaction capitaliste est peut-être le plan local d’urbanisme de 1916.  L’autre titre auquel vous pensiez pour votre ouvrage était justement Vernaculars of Capitalism. Pourriez-vous nous en dire plus sur la possible application de cette thèse à l’ensemble d’une ville ? Non seulement aux aspects économiques des immeubles du début des années 1900, mais également à la ville contemporaine ?

Carol Willis : Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, même si les aspects financiers et le plan local d’urbanisme, dans le cas de New York, continuent de régir la construction des immeubles, la technologie devient le facteur primordial. On sous-estime souvent le développement des néons, qui consomment moins et permettent ainsi de créer des espaces plus profonds. Bien que, de nos jours, les fenêtres des immeubles de bureaux de première classe offrent des vues sur l’extérieur, on peut construire des plateaux s’éloignant à plus de 13 mètres d’une fenêtre, aménagés soit en open spaces ou bien cloisonnés à la manière de la bande dessinée Dilbert, le matériel bureautique rangé au fond du plateau. La climatisation et les néons – ainsi qu’une préférence pour les rideaux de verre sur squelette en acier de style moderniste – créent une tectonique de plancher permettant des bâtiments bien plus larges et volumineux. Cela était tout simplement impossible dans les années 1920. Comment cela s’applique-t-il à la ville ? À New York évidemment, l’aménagement par zones est la forme de construction dominante la plus visible. Le plan d’urbanisme de 1916 produit des tours en forme de gâteaux de mariage, ou à échelonnage en diagonale avec des niveaux ouverts sur le ciel, à la manière très typique et indélébile de la grille de Manhattan. La nouvelle formule fondée sur ce code oriente la masse des bâtiments en retrait de la rue, qui apparaissent comme des objets uniques dans un espace ouvert ; les murs d’immeubles et les rues-couloirs sont ainsi fracturés.

La particularité de New York a été modifiée par intermittences, mais je pense que l’essentiel est que la ville soit composée de bâtiments différents sur des parcelles individuelles : c’est une ville de promoteurs, en quelque sorte. Vous pouvez faire autant d’efforts qu’en ont fait John D. Rockefeller pour faire du Rockefeller Center un véritable centre, un modèle pour la promotion immobilière à venir, et les urbanistes modernistes qui préfèrent les superblocks et les tours au milieu de places, New York l’emporte sur de telles tentatives par le nombre de parcelles de propriétés privées développées séparément. C’est ce qui constitue le vernaculaire de Manhattan. Je parle des immeubles comme l’on considère l’architecture vernaculaire, ce qui contraste fortement avec une explication d’architecte qui célébrerait l’ego et l’expression individuelle. Les bâtiments sont créés par des forces globales, tout comme la géologie a façonné les habitations troglodytiques des Anasazi ou les villages perchés en Italie. C’est ainsi que le terme « vernaculaire » fait sens, selon moi, pour expliquer le paysage urbain.

Jesse Seegers : L’Empire State Building est un cas intéressant. Vous en racontez l’histoire dans votre livre : ses promoteurs avaient établi que le retour sur investissement le plus rentable, pour tout le site, était une tour de 70 étages environ, mais que s’ils l’élevaient de dix étages supplémentaires afin d’en faire l’immeuble le plus haut du monde, une autre colonne d’ascenseur était nécessaire, ce qui réduisait la surface locative par étage et résultait en un projet économiquement moins viable. Cependant, si l’immeuble acquérait le statut de « bâtiment le plus élevé du monde », ils prévoyaient d’imposer des loyers plus chers et un retour sur investissement plus rapide, misant, au final, sur la meilleure solution financière…

Carol Willis : Bien sûr, ils avaient tort, car le timing joue un rôle primordial dans la construction d’un bâtiment et dans son développement urbain. Si les choses s’étaient bien passées, si le marché boursier avait continué de prospérer et les entreprises de s’agrandir, ces promoteurs auraient peut-être réussi à établir un nouveau centre sur la 34e Rue. L’emplacement est un critère essentiel en aménagement urbain. Je ne pense pas que ce dernier soit une affaire de déterminisme, qu’il soit technologique ou économique, chaque bâtiment résulte d’une équation que les économistes appellent une équation sur-déterminée ; il y a, tout simplement, trop de variables.

Vue aérienne de Chicago © D.Delano

Régulation et évolution

Jesse Seegers : Pourriez-vous nous en dire plus sur la manière dont les bâtiments suivent les grandes règles capitalistes et économiques, malgré toutes ces variables ? Qu’est-ce qui empêche chaque bâtiment d’être une réponse unique à de telles variables, à de si nombreux cas particuliers ? Y a-t-il une tension entre les caractéristiques de chaque site et la tendance générale à la normalisation ?

Carol Willis : New York n’est plus le haut lieu des bâtiments les plus élevés du monde, notamment parce que ce n’est plus légalement possible. En outre, je pense que nous ressentons une certaine animosité envers les grands immeubles et préférons l’échelle humaine et de la rue. Je pense qu’il est possible de profiter de ces deux choses à la fois.

Jesse Seegers : Pensez-vous que le plan local d’urbanisme de 1916 (celui limitant la hauteur des bâtiments) à New York soit comparable à la limitation imposée par Chicago en 1893 qui eut pour conséquence de faire fuir nombre d’entreprises vers New York et de pénaliser à long terme la croissance économique de Chicago ?

Carol Willis : Il faut envisager la situation sous un angle historique : lorsqu’une ville impose des contraintes de hauteur, c’est souvent parce qu’il s’agit d’un moment clé de son développement et de sa politique. Ces phases classiques sont communes à toutes les villes du monde. J’ai déjà parlé de ce phénomène, même si je n’ai pas écrit à ce propos. Les phases sont les suivantes :

1 – Le laisser-faire.

2 – La régulation, grâce aux plans d’urbanisme. À New York, cette phase se déroule en 1916 et juste après, dans les années 1920.

3 – La planification de base, lorsque la régulation évolue vers la véritable prise de décisions concernant les plans, plutôt que le contrôle ou l’influence sur le développement et la régulation de parcelles individuelles. Pour New York, cette phase entre en vigueur dans les années 1960 avec Robert Moses.

4 – Le refoulement, ou ce que j’appelle « l’urbanisme très évolué », qui est la phase actuelle de New York. À Paris, et en Europe en général, l’urbanisme est entré dans cette phase depuis Haussmann, et depuis 1900 à Londres. Les villes européennes ont atteint leurs limites de développement il y a longtemps, New York dans les années 1980 environ, et nous sommes depuis dans cette phase d’urbanisme très évolué qui est une sorte de consensus public régi par la politique dominante.

World Trade Center © J. Witkins

Jesse Seegers : Vous avez déclaré que les principales différences entre les grandes tours des xx e et xxi e sont qu’elles étaient autrefois construites en acier, des immeubles de bureaux et situées aux États-Unis ; suite à un changement de paradigme, les gratte-ciel sont à présent surtout en béton, à usages multiples et plus susceptibles d’être en Asie ou au Moyen-Orient. Si l’on passe d’une économie d’entreprise à une économie du savoir, quelle incidence y aura-t-il sur les gratte-ciel ? Sommes-nous déjà face à cette situation, dans le sens où les gratte-ciel sont à présent surtout résidentiels et que nombreux sont ceux qui travaillent depuis leur domicile ? Y a-t-il toujours autant de gratte-ciel de bureaux en cours de réalisation, dont la construction est éclipsée par l’augmentation d’immeubles résidentiels à usages mixtes ?

Carol Willis : Cela dépend beaucoup de la ville dont il est question. New York a eu énormément de chance, ou disons plutôt qu’elle a été maligne, au cours de la dernière récession ; son identité de ville mondiale a préservé sa compétitivité dans l’économie internationale. C’est ce qui l’a maintenue à une meilleure place – tous domaines confondus – que toute autre ville des États-Unis. En ce qui concerne l’utilisation des bâtiments, le plan d’urbanisme de New York n’encourage pas vraiment les immeubles à usages multiples. Le Time Warner Center est ce que certains appellent « le premier gratte-ciel asiatique de New York », car il est fait de tours distinctes et d’usages complémentaires, avec un important centre commercial qui constitue le socle-podium des tours. Cette solution est privilégiée à travers l’Asie : une tour à usages multiples avec des bureaux aux premiers étages, des services au milieu et un hôtel au sommet. Il y a presque toujours un hôtel aux derniers étages, s’installant sur des niveaux plus restreints et disposant souvent d’une cour intérieure ou d’un atrium traversant l’espace. Cette pratique fonctionne très bien au niveau du plan pour une cime qui rétrécit en son sommet, la tour prenant ainsi les airs d’un gratte-ciel élancé et élégant. Un bâtiment extrêmement haut mérite alors le terme romantique de « gratte-ciel » et non pas d’immeuble « de grande hauteur ». Lorsqu’on observe la typologie des gratte-ciel à travers le monde, l’usage mixte apparaît comme le moyen de créer une enclave urbaine à la verticale. On peut comprendre tous les usages complémentaires qui existent à New York rien que par ce qui les avoisine.

Jesse Seegers : Ils se font plutôt à l’horizontale.

Carol Willis : Avant la dernière crise financière, l’exploitation optimale de la ville de New York passait par les appartements de luxe, la plupart de la promotion immobilière était absorbée par ces appartements. Je le répète, dans la mentalité du promoteur, le timing est essentiel, la fonction suit la finance et la finance suit la fonction : elles sont interdépendantes.

Jesse Seegers : Ces quinze dernières années, nous avons assisté au phénomène du promoteur qui bâtit une copropriété et engage un architecte de renom pour ainsi exiger 10 à 15% de plus sur les loyers de ces immeubles ultra design. Quel regard portez-vous sur ce phénomène et quel rapport faites-vous avec votre théorie ?

Carol Willis : Comme le dit la première phrase du livre, j’ai choisi l’expression « form follows finance » pour son allitération, et parce que l’aspect financier, forcément important, a souvent été sous-estimé. Il est clairement question d’argent, mais pas seulement d’argent. Même si la promotion immobilière est à 90% une question de finance, cela ne veut pas dire que dépenser un peu plus rapporte plus. Il me semble que c’est l’argument récurrent du design haut de gamme, ou de la starchitecture ou de l’image de marque, quelle que soit la façon dont on l’envisage. Dans les années 1920, cela aurait pu être un appartement de Park Avenue conçu par Rosario Candela. Un nom connu pour son design gracieux ou mondain était important, mais c’était l’adresse qu’on achetait avant tout. C’est sans doute encore le cas aujourd’hui, on « achète » des quartiers : Williamsburg, Soho ou High Line par exemple, l’idée étant qu’un quartier renommé a plus de valeur qu’un quelconque endroit sur la 23 e Rue. Selon moi, le design architectural est important, a ses propres fins, et les starchitectes sont de bons architectes, ce ne sont pas que des célébrités : s’ils gagnent un prix Pritzker, c’est que leur travail le mérite. Vous achetez du cachemire et non pas de la laine. Les deux sont à même de vous tenir chaud, mais l’un est plus beau et plus agréable.

Jesse Seegers : Quelle est la suite de Form Follows Finance ?

Carol Willis : Dans le livre, je passe sur la seconde moitié du siècle car il s’agit d’un sujet à part entière qui aurait pris bien trop de temps au regard de mes projets en cours et de l’énergie que j’ai consacrée à Form Follows Finance. Le livre s’est développé au cours de plusieurs années en passant par diverses démarches intellectuelles. C’est un texte assez réducteur, mais le traitement de toutes les informations et recherches, ainsi que trouver un moyen de les condenser n’ont pas été une mince affaire. Bien que j’aime le Modernisme, je ne suis pas convaincue qu’il soit aussi riche en explications que la première moitié du xx e siècle, car dans le cadre du Modernisme, le style est réellement essentiel.

Le « super grand » m’intéresse vraiment, comparer les bâtiments à travers les pays, plutôt que dans une seule ville ou sur une seule période, voir en quoi ils se ressemblent et se demander « que peut-on dire du xxi e siècle ? » Il y a à présent une rupture naturelle entre les xx e et xxi e siècles, à cause du 11 septembre notamment – après lequel, les journalistes et la presse proclamaient la mort du gratte-ciel, lançant des titres comme « y aura-t-il encore des gratte-ciel ? ». Or il y en a plus qu’en toute autre décennie. Je demande donc : si l’on observe ce qui s’est passé et ce qui se passe au regard de cette première décennie de design, qu’est-ce que ces deux siècles ont en commun ? Ils ont des caractéristiques communes certes, mais, lorsque les architectes s’expriment séparément, ils soutiennent que chacun de leurs édifices est unique, car les promoteurs voudraient que leurs bâtiments respectifs soient emblématiques de la ville où ils se situent. Ces deux faits coexistent. En outre, la concentration d’un grand nombre de personnes suppose un transit de masse et des espaces publics partagés par tous, autrement dit bien programmés, attractifs et accessibles. Il me semble que c’est la façon la plus logique d’utiliser la planète.

Traduit de l’anglais par Heather Tipton

 

 

(Cet article a été publié dans Stream 02 en 2012.)

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OSREVER est l’anagramme du logiciel de traduction en ligne REVERSO. Les artistes Nicolas Moulin, Marie Reinert et Eric Stephany ont compilé des textes théoriques et personnels sur le bureau et les ont traduits via le logiciel en ligne, d’une langue à l’autre, pour revenir au français. Scénario autonome et anticipatoire illustré par une collection d’images référentes, personnelles ou volées par les artistes, REVERSO propose une lecture critique des franges délaissées de l’immeuble de bureaux. Nicolas Moulin est un artiste français alliant la pratique de la photographie, de la vidéo et de la sculpture. Marie Reinert est une artiste française travaillant à la frontière de la performance. Son travail se définit par un principe d’infiltration et de parasitage qu’elle déploie dans différents contextes. Éric Stephany. Formé en droit, en histoire de l’art et en architecture, Eric Stephany développe un travail de photographie et de sculpture, qui, suivant les traces du concept romantique allemand d’Einfühlung (empathie), cherche à souligner la manière dont nous projetons sur les architectures qui nous entourent l’émotion qu’elles nous font ressentir.

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